Intervention sur la PPL portant Régulation, responsabilisation et simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous entamons la première lecture de cette proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes que nous présente le groupe socialiste, écologiste et républicain.
Derrière ce titre ambitieux se cache un énième texte sur le transport des personnes, faisant écho à la loi Thévenoud d’octobre 2014. Peu appliquée car inepte et inapplicable, cette loi faisait suite à des mouvements de grève et à des prises à partie de la part de chauffeurs qui ont donné une image très négative de notre pays pour finalement très peu de résultats.
Dans ce nouveau texte, nous avons découvert un inventaire à la Prévert de mesures très contraignantes pour les VTC : une formation, qui dépend des chambres de métiers et de l’artisanat, excessivement exigeante pour les chauffeurs – moins de 30 % de réussite en juin 2016 – et une complexification du statut défini par la LOTI, et utilisé par les VTC, qui fera drastiquement chuter le nombre de chauffeurs.
Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, ne nous voilons pas la face : ce texte, qui entend « réguler », est clairement en faveur des taxis et nuira à l’activité des plate-formes VTC, avec comme première cible le géant Uber. Soit. C’est déjà un premier aveu de faiblesse et d’incompréhension pour votre majorité face à la révolution numérique et à ses opportunités de développement.
Mais la proposition de loi méconnaît une réalité : quand on parle de VTC, on ne parle pas que de Uber. Nombreuses sont les start-up françaises qui se sont développées dans ce secteur à forte demande et à forte croissance.
AlloCab, Marcel, Chauffeur-Privé, Snapcar sont français, ils paient leur impôts en France, embauchent en France et sont directement menacés par votre texte.
En s’attaquant aux VTC, on s’attaque en réalité à ces entreprises françaises. Ces plate-formes n’ont d’ailleurs jamais été conviées aux réunions des groupes de travail mis en place par le ministère des transports suite à la mission de Laurent Grandguillaume sur l’avenir du secteur du transport public particulier de personnes.
Le problème, c’est qu’elles représentent 15 000 à 20 000 emplois en France, notamment dans des territoires marqués par un taux de chômage élevé, comme la Seine-Saint-Denis, et une moyenne d’âge plutôt jeune. Pour des personnes à faible revenu, ce travail représente souvent un complément financier important.
Ce secteur, qui se développe aujourd’hui dans l’ensemble de notre territoire, est en tel développement que ses besoins additionnels de croissance sont estimés à près de 10 000 chauffeurs supplémentaires chaque année. Les chiffres sont têtus. Tout un écosystème se développe autour de l’activité VTC, faisant vivre par exemple des start-up de location de berlines ou des garages spécialisés, ce qui génère de nombreux emplois induits.
Ainsi nos entreprises françaises demandent de l’air et reçoivent, en réponse, une enclume. Cette proposition de loi aura pour effet une réduction drastique du nombre de chauffeurs affiliés aux plate-formes de VTC, avec pour conséquences l’allongement du temps d’attente, la perte d’attractivité des plateformes, la hausse de leurs prix, tout cela au détriment des consommateurs.
Nous nous dirigeons donc vers la fin du dynamisme impulsé par les VTC : ces plateformes illustraient pourtant la possibilité pour les transports de personnes de surfer sur la vague numérique. Le texte vient dissoudre ces initiatives, pourtant porteuses de croissance, faisant primer le monopole du « tout taxi ».
Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, nous sommes au moins d’accord sur un point : le problème de la révolution numérique vient de ce qu’elle se construit, et cela très rapidement, sur un vide juridique. Les start-up françaises se sont installées dans une zone floue. Nous ne devons pas laisser la loi de la jungle s’installer. Alors oui, l’heure est venue de légiférer. Mais légiférer ne veut pas dire brider.
Les VTC font partie de cette nébuleuse d’entreprises dynamiques, digitales, animées, rapides, bluffantes. Nous ne pouvons nous contenter de durcir la législation actuelle pour les refréner : elles reviendront forcement sous une nouvelle forme car c’est une économie agile, en ébullition. Cessons donc de voir la révolution numérique à travers un prisme conservateur. Modernisons plutôt la législation afin de faciliter la prise d’initiative, tout en luttant contre les distorsions de concurrence.
C’est d’ailleurs ce que j’ai souhaité proposer dans mes amendements.
L’économie de la France en a profondément besoin : pour son tourisme, pour son dynamisme, pour sa politique de la ville, pour sa croissance, pour ses emplois et pour son image à l’international. À New York, il existe 60 000 VTC pour 13 000 taxis. Le rapport est d’un à cinq. À Londres, on compte 90 000 VTC contre 25 000 taxis. Bien sûr, les taxis de ces deux villes n’aiment pas la concurrence des VTC, mais ils sont toujours là !
En France, on ne sait même pas précisément combien il y a de VTC. En Île-de-France, ils seraient entre 15 000 et 20 000, selon les sources. Le rapport Thévenoud attestait d’ailleurs avec justesse que 68 000 emplois pourraient être créés si le marché des VTC s’y développait dans les mêmes conditions qu’à New York ou à Londres.
Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, il était possible de trouver un juste milieu. Visiblement, cet objectif a été raté.
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