PLF pour 2018 (seconde partie) : MEDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES
Mardi 14 novembre 2017
Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, mesdames les rapporteures, mes chers collègues, je souhaite tout d’abord saluer, une fois encore, la qualité des travaux menés par nos rapporteurs, et l’éclairage que ce travail apporte à l’activité budgétaire et médiatique. Et le coeur de cette actualité, ce sont notamment les baisses de dotations importantes pour notre audiovisuel public, suite à des arbitrages très tardifs du Gouvernement.
Les acteurs de l’audiovisuel français ont constaté une véritable volte-face dans le budget 2018, qui aura logiquement, hélas, des conséquences directes sur leurs choix en matière de création, d’information sur le territoire ou de développement du numérique. Delphine Ernotte a ainsi estimé publiquement que la baisse des dotations constituait une remise en cause des choix tactiques du groupe en matière de fiction.
La présidente de France Médias Monde, Marie-Christine Saragosse, a également signifié clairement que le recul de la dotation allouée au groupe signifiait des emplois en moins au sein du siège et un recul en matière de couverture territoriale.
C’est pourtant une logique simple de politique publique : on ne peut pas demander toujours plus avec toujours moins de moyens. Mais, madame la ministre, c’est bien ce que vous essayez de faire, dans l’impréparation, avec votre projet de budget pour 2018.
Je m’interroge donc sur la pertinence des contrats d’objectifs et de moyens. Le précédent gouvernement a fait voter, pendant tout le quinquennat, des budgets largement inférieurs aux montants négociés dans les COM, avant de faire remonter les crédits en année électorale.
Nous avions déjà soulevé la question de ces pratiques politiques irresponsables pour nos finances publiques et pour la sincérité du budget de l’État, qui déstabilisent l’ensemble des acteurs de l’audiovisuel.
Madame la ministre, dans votre premier projet de budget présenté devant le Parlement, vous demandez aux opérateurs un effort de 36 millions d’euros par rapport à la loi de finances pour 2017 et de 78 millions d’euros par rapport à la trajectoire financière négociée dans leurs COM respectifs, soit 48 millions pour France Télévisions, 25 millions pour Radio France et 2 millions d’euros pour France Médias Monde.
Madame la ministre, j’ai bien conscience que les pratiques fiscales du précédent gouvernement vous rendent la tâche ardue, et que les engagements de l’État sont intenables aujourd’hui. Les socialistes n’auraient pas dû conclure des COM en forte hausse en 2016, sachant pertinemment qu’ils ne seraient pas en situation de tenir leur parole.
Mais vous continuez dans cette pratique, en multipliant les annonces tardives, en naviguant à vue, en remettant en cause les stratégies et les choix des opérateurs.
C’est pourtant l’inverse dont notre audiovisuel a besoin. Aujourd’hui, il faut garantir aux professionnels de l’audiovisuel une signature fiable de l’État, et une réelle vision d’ensemble des crédits budgétaires.
Je reviendrai également sur la situation de France Télévisions, grande perdante des arbitrages du Gouvernement, qui porte l’essentiel de l’effort, soit 30 millions sur les 36 millions d’euros de baisse par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.
À cette baisse de dotation, s’ajoute la non-compensation de la perte de ressources propres liée à la fin de la publicité en journée sur les programmes jeunesse. Le COM de France Télévisions, signé en décembre 2016, prévoyait la compensation intégrale de cette perte de revenus. La facture totale pour France Télévisions, c’est donc une perte de 47 millions d’euros par rapport à sa trajectoire financière initiale.
La situation dans laquelle vous plongez France Télévisions, madame la ministre, aurait pourtant pu être atténuée avec le relèvement de la taxe sur les opérateurs de communication électronique – TOCE – , dite taxe Copé, créée en 2009 pour compenser la perte de revenus publicitaires liée à l’arrêt de la publicité en soirée. Hélas, depuis plusieurs années, le Gouvernement a pris l’habitude de réduire la part du produit de cette taxe pour France Télévisions, et d’en récupérer une part toujours plus grande pour le budget de l’État. En 2016 et 2017, le gouvernement socialiste avait choisi de n’affecter que 166 millions d’euros à France Télévisions, alors que le produit de la taxe avoisinait 300 millions d’euros.
Dans votre projet de budget pour 2018, madame la ministre, en baissant la taxe de 79 millions d’euros par rapport à 2017, vous vous inscrivez en complète continuité avec la politique audiovisuelle menée par le précédent gouvernement, puisque vous déviez vers le budget de l’État une ressource que le législateur avait pourtant souhaité flécher vers l’opérateur. Vous allez d’ailleurs plus loin que la tendance socialiste.
Cette pratique est injuste et inexplicable, surtout au moment où France Télévisions accuse une perte de revenus de 17 millions d’euros du fait du recul contraint et forcé de ses recettes publicitaires.
Visiblement, la situation difficile et soudaine que votre Gouvernement a imposée à France Télévisions avait trouvé écho sur les bancs de votre majorité, pendant un court instant. Pour pallier l’effort budgétaire demandé, le rapporteur général avait ainsi, judicieusement, proposé un amendement sur le moratoire de la suppression de la publicité sur les programmes jeunesse et sur le relèvement du montant de la TOCE de 3 millions d’euros. Mais cet amendement a subitement disparu des radars avant même d’avoir été présenté, alors qu’il avait reçu un avis favorable de la commission. C’est un recul politique incompréhensible.
Sur un autre sujet, en revanche, je constate que le Gouvernement a déposé des amendements afin d’appuyer les missions du Bureau export, une demande que j’avais défendue la semaine dernière en commission élargie, pour un montant plus important. Nous aurons l’occasion d’en débattre plus tard. Je salue toutefois ce revirement, que la filière musicale attendait fortement.
En conclusion, cette mission « Médias, livre et industries culturelles » comporte à la fois des injustices considérables pour nos acteurs de l’audiovisuel public et des reculs encore plus importants sur les engagements de la parole de l’État. C’est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains ne votera pas ce projet de budget.
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