Le 10 décembre, afin de répondre aux revendications des Gilets jaunes sur le pouvoir d’achat, le président de la République s’est engagé à ce que « le salaire d’un travailleur au smic » augmente « de 100 euros par mois » en 2019.
Au-delà des difficultés liées à la lisibilité de ce dispositif, ce format d’augmentation entre en contradiction directe avec les promesses du chef de l’Etat. En effet, l’octroi de la prime d’activité ne dépend plus de la seule situation du salarié concerné mais également de la composition et des revenus du ménage. Ainsi, une personne au smic dont le conjoint gagne trois fois ce montant n’obtiendra aucune bonification.
En soulignant lui-même dans Les Echos que « 1,2 million de salariés au smic se trouvent dans les 30 % de foyers les plus aisés », Edouard Philippe décrivait la prise en compte des revenus du ménage dans le versement comme une mesure de justice sociale. Or, à une époque où l’inégalité salariale demeure un facteur majeur d’inégalité entre les hommes et les femmes, les modalités d’attribution de la prime sont au contraire particulièrement injustes envers ces dernières.
Alors que sur une année, à poste de travail équivalent, une Française gagne en moyenne 9 % de moins que son homologue masculin et que 58,5 % des bénéficiaires du smic sont des femmes, comment ne pas voir dans le choix de la revalorisation de la prime d’activité une précarisation du statut de la travailleuse ?
Estocade. Car, au regard de la froideur des statistiques, l’inégalité salariale revêt également une réalité domestique. Priver les bénéficiaires du smic de la hausse de la prime d’activité en invoquant les revenus du conjoint, c’est asséner une véritable estocade à l’indépendance économique de la femme, acquise de haute lutte. Et si les femmes ne sont pas les seules victimes des règles encadrant la prime d’activité, elles représentent une majorité suffisante parmi les plus pauvres des salariés pour ne pas dénoncer l’atteinte symbolique que porte cette mesure au combat en faveur de l’égalité entre femmes et hommes.
Aussi, au-delà du fait que l’assujettissement de la formule choisie limite le bénéfice de la mesure à seulement 55 % des bénéficiaires du salaire minimum, au-delà du fait que le montant de l’augmentation initialement prévue de 100 euros est aujourd’hui réévalué aux alentours de 90 euros, nous refusons que les femmes soient à nouveau sacrifiées sur l’autel d’enjeux technocratiques déconnectés d’une réalité socio-économique qui leur est encore et toujours défavorable. L’augmentation de la prime d’activité doit concerner tous les bénéficiaires du salaire minimum, sans distinction de situation, ni de sexe.
Véronique Louwagie est députée Les Républicains de l’Orne. Cette tribune est cosignée par les députées LR Emmanuelle Anthoine (Drôme), Nathalie Bassire (La Réunion), Valérie Bazin-Malgras (Aube), Valérie Beauvais (Marne), Emilie Bonnivard (Savoie), Valérie Boyer (Bouches-du-Rhône), Marine Brenier (Alpes-Maritimes), Josiane Corneloup (Saône-et-Loire), Marie-Christine Dalloz (Jura), Marianne Dubois (Loiret), Virginie Duby-Muller (Haute-Savoie), Annie Genevard (Doubs), Brigitte Kuster (Paris), Valérie Lacroute (Seine-et-Marne), Geneviève Lévy (Var), Constance Le Grip (Hauts-de-Seine), Frédérique Meunier (Corrèze), Bérengère Poletti (Ardennes), Nadia Ramassamy (Réunion), Michèle Tabarot (Alpes-Maritimes), Laurence Trastour-Isnart (Alpes-Maritimes) et Isabelle Valentin (Haute-Loire).