Dans une vie de parlementaire, certains votes sont difficiles.
Le vote du mardi 17 mars 2015 sur la Proposition de loi sur la fin de vie en est un.
Après un rappel du contexte, voici les raisons de mon abstention (alors que mon groupe a voté pour) :
Rappel du contexte
Cette proposition de loi est issue d’une mission conjointe de ses deux auteurs, nommés par le premier ministre pour rédiger une proposition de loi modifiant la loi Leonetti sur la fin de vie de 2005.
Dans sa lettre de mission, le premier ministre fixait 3 objectifs :
- assurer le développement de la médecine palliative
- mieux organiser le recueil et la prise en compte des directives anticipées.
- définir les « conditions et les circonstances précises dans lesquelles l’apaisement des souffrances peut conduire à abréger la vie »
Ces questions devaient être abordées « dans un esprit de rassemblement ».
Partant d’un constat partagé sur l’existence de grandes inégalités des citoyens face à la mort et l’existence d’un « mal-mourir » dû au manque d’accès aux soins palliatifs, la proposition de loi recommande la création de deux nouveaux droits pour les malades :
- Un droit à la sédation profonde en phase terminale et continue jusqu’au décès, lorsque la souffrance est réfractaire au traitement ou lorsque les traitements de survie sont interrompus.
- Le droit pour le patient de voir ses directives anticipées, volontés écrites, devenir plus contraignantes pour l’équipe médicale sous certaines conditions.
Pourquoi j’ai décidé de m’abstenir ?
- Tout d’abord parce que ce texte rappelle que dix ans après l’adoption de la première Loi Leonetti, celle-ci reste mal connue et peu appliquée.
On continue bien souvent à mal mourir en France, dans des conditions douloureuses ou dégradantes. Le philosophe Damien Le Guay estime que, sur 550 000 décès, 150 000 personnes meurent mal en France.
D’où notre insistance lors des débats et nos amendements pour le développement des soins palliatifs en France et la formation des étudiants en médecine.
J’ai même apporté mon soutien à la proposition de loi de mon collègue Philippe Gosselin visant à reconnaître les soins palliatifs comme « grande cause nationale 2016 ».
S’il ne s’agissait que de développer les soins palliatifs, légiférer de nouveau sur cette question délicate était-il vraiment nécessaire ?
- Le Groupe UMP n’étant pas maître du calendrier parlementaire, on est en droit de se demander pourquoi un tel texte a été inscrit à l’ordre du jour du Parlement.
Des amendements visant à légaliser le suicide assisté et l’euthanasie ayant été déposés aussi bien en Commission qu’en séance, force est de constater que nous ne sommes pas loin de la proposition N°21 du candidat HOLLANDE visant à légaliser l’euthanasie.
Lors de l’examen en séanc , ces amendements- déposés par 120 députés socialistes, les écologistes et les radicaux- ont été rejetés par 89 voix contre 70 (50 députés socialistes ont voté pour ces amendements quand seulement 40 s’y sont opposés).Sans les voix du Groupe UMP, les députés socialistes auraient adopté ces amendements en totale contradiction avec la volonté du Président de la République de proposer et d’adopter un texte de rassemblement sur le sujet de la fin de vie.
Par conséquent,
- La pente glissante du texte ayant été évitée,
- La liberté de chacun est reconnue et mieux prise en compte,
- Mes convictions profondes étant le respect et la protection de la vie,
- Je ne me suis donc pas opposée à ce texte (car il ne s’agit pas de légaliser l’euthanasie et que je respecte le travail de mon ami Jean Léonetti)
- mais je persiste à penser qu’une meilleure connaissance et une meilleure application de la Loi Léonetti de 2005 aurait suffi.