Vendredi à 3h30 du matin, l’Assemblée nationale a adopté le projet de loi pour la Confiance dans la vie publique (en version ordinaire et organique). J’ai choisi de m’abstenir sur ce texte.
· Ce projet de loi annonce de très nobles objectifs, pour, créer un « choc de confiance ». Il est vrai que nous devons répondre aux attentes de transparence de l’opinion publique, car il y a urgence. La forte abstention constatée lors des dernières élections marque une certaine défiance à l’égard de l’action publique, et la perte de confiance dans les élus. Cela doit nous conduire à renforcer notre exigence en matière d’exemplarité.
-  J’avais d’ailleurs proposé un amendement pour aller plus loin dans la co-construction législative avec nos concitoyens : généraliser la consultation publique en ligne, par internet, sur tous les textes de loi avant leur examen par le Parlement. Aujourd’hui, le numérique doit être davantage valorisé par nos institutions comme étant un formidable outil pour les moderniser, et permettre une démocratie plus directe, ouverte, simplifiée, réactive et contemporaine. Le digital doit permettre à tous de devenir acteurs directs des institutions. Le Gouvernement a rejeté mon amendement, et je le regrette.
-  J’ai choisi de m’abstenir sur ce texte, car il reste selon moi une simple loi de circonstances, avec beaucoup de mesures d’affichage, mais pas d’ambition globale.
– J’ai notamment dĂ©noncĂ© en sĂ©ance le revirement et recul du Gouvernement sur l’obligation de casier judiciaire vierge concernant les candidats Ă une Ă©lection. Je soutiens totalement cette proposition, d’ailleurs promise par le PrĂ©sident de la RĂ©publique pendant sa campagne. Or le Gouvernement a choisi soudainement d’y renoncer, et les dĂ©putĂ©s En Marche ont dĂ©posĂ© un amendement de suppression de cette obligation (après avoir votĂ© POUR 5 jours avant en commission !), en la remplaçant par une peine d’inĂ©ligibilitĂ©, ce n’est pas du tout la mĂŞme chose : cette peine dĂ©pend uniquement de la dĂ©cision du juge, et se rĂ©vèle bien moins importante.
– J’ai Ă©galement soulevĂ© le fait que les textes concernent spĂ©cifiquement les parlementaires, alors que la vie publique comporte de nombreux autres acteurs, comme les fonctionnaires, qui sont pourtant très peu concernĂ©s par les mesures. S’il est nĂ©cessaire d’édicter des règles, nous devons Ă©viter la stigmatisation. Les Ă©lus font battre le cĹ“ur de notre dĂ©mocratie ; ils ont un rĂ´le souvent difficile, au service de nos concitoyens, et ne doivent pas ĂŞtre systĂ©matiquement suspectĂ©s de malhonnĂŞtetĂ© potentielle. Il serait dangereux de faire planer ce doute : cela consisterait Ă briser le pacte de confiance qui lie les Ă©lus aux citoyens.
– J’ai enfin dĂ©noncĂ© la suppression de la rĂ©serve parlementaire, au dĂ©triment des territoires ruraux, sans compensation. Loin des fantasmes, loin d’être un dispositif clientĂ©liste, la rĂ©serve parlementaire est surtout un dispositif d’accompagnement des territoires. Elle est rendue publique chaque annĂ©e (Ă titre d’exemple, je publie chaque annĂ©e les dotations dans la presse locale), en toute transparence, et ses affectations sont systĂ©matiquement validĂ©es par le Ministère de l’IntĂ©rieur. Elle ne transite pas par le compte du parlementaire. La rĂ©serve parlementaire reprĂ©sente souvent la somme manquante pour finaliser un projet : financer la construction d’un prĂ©au d’école ou d’une salle multi-activitĂ©s, ou encore soutenir une association pour un Ă©vĂ©nement. La rĂ©serve parlementaire, c’est Ă la fois une aide Ă l’attractivitĂ© des communes, la reconnaissance du bĂ©nĂ©volat, et l’accompagnement sur des projets locaux au service de l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral. En supprimant cette mesure, le Gouvernement handicape considĂ©rablement nos territoires, sans prĂ©voir de compensation. La majoritĂ© En Marche s’est lancĂ©e dans une course effrĂ©nĂ©e vers la moralisation Ă tout prix, faisant fi des consĂ©quences dommageables pour les territoires et les associations.
En cinq annĂ©es, avec la rĂ©serve parlementaire, j’ai aidĂ© les projets de :
- 36 collectivités
- 81 associations
Je regrette ainsi que les textes fassent beaucoup d’affichage, au détriment du fond et du long terme. En témoigne d’ailleurs les conditions d’examen dans l’hémicycle, particulièrement désordonnées, avec beaucoup d’amateurisme. 31 textes sur la confiance et la transparence de la vie publique ont déjà été votés depuis 1985. Je ne suis malheureusement pas persuadée que ce nouveau projet de loi incarne un vrai texte d’avenir, d’ampleur, pour notre vie publique.
Le Dauphiné Libéré, 30 juillet 2017
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