L’appel des cadets bourbons : macron-économie, micro-solutions ! (Le Figaro)

L’appel des cadets bourbons : macron-économie, micro-solutions ! (Le Figaro)

L’appel des cadets bourbons : macron-économie, micro-solutions ! (Le Figaro) 355 142 Virginie DUBY-MULLER

FIGAROVOX/TRIBUNE – A l’occasion de la présentation de la loi Macron, huit jeunes députés expriment leur opposition au texte porté par le ministre de l’Economie.

http://www.lefigaro.fr/vox/economie/2014/12/10/31007-20141210ARTFIG00333-l-appel-des-cadets-bourbons-macron-economie-micro-solutions.php

Damien Abad, Député de l’Ain

Julien Aubert, Député de Vaucluse

Guillaume Chevrollier, Député de la Mayenne

Alain Chrétien, Député de la Haute-Saône

Gérald Darmanin, Député du Nord

Virginie Duby-Muller, Député de la Haute-Savoie

Daniel Gibbs, Député de Saint-Barthélemy et Saint -Martin

Laurent Marcangeli, Député de la Corse du Sud


Après les propos très controversés d’Arnaud Montebourg, parti en guerre, tel Don Quichotte, contre les avantages (supposés) et les rentes (dénoncées) des professions réglementées, son successeur, Emmanuel Macron, a opté pour une stratégie en oblique: les professions règlementées ont été dissimulées dans un vaste projet sur la relance d’activité, censé réveiller la croissance. C’est ainsi qu’elles coexistent avec les autocars et l’ouverture des magasins le dimanche. Lorsque le sage montre la dérégulation sauvage, le ministre agite le hochet de l’ouverture dominicale.

Incroyable renversement que cette majorité de Gauche qui adore pousser des cris d’orfraie sur l’ultra-libéralisme «droitier» supposément ancré à l’UMP et qui s’apprête à faire une révolution copernico-thatchérienne.

 

 

 

 

 

 

Que le lecteur ne se méprenne pas. Nous sommes convaincus que la France souffre d’un excès de règlementation, de normes, de bureaucratie. Néanmoins, notre approche de l’économie est pragmatique et non pas idéologique. Alléger ne veut pas forcément toujours dire libéraliser. Simplifier n’est pas synonyme de mise en concurrence. Faciliter la vie des acteurs ne veut pas dire les détruire. Il y a, dans le domaine des lois et des normes, celles qui protègent et celles qui asphyxient, comme il y a un bon et un mauvais cholestérol.

Le maître mot du projet Macron semble être le mot «ouvrir». Ouvrir la cage aux oiseaux pour laisser la croissance voler de ses propres ailes. L’ouverture, dans la sémantique politique, permet de positiver: l’ouverture renvoie à la liberté, à la tolérance, à l’aération. Dans tous les registres de langage, c’est un appel du pied à la modernité: le monde actuel n’est-il pas ouvert? Se replier n’est-il pas signe de mauvaise santé, de frilosité, d’autarcie? Il faut être ouvert (d’esprit).

Et pourtant, l’ouverture et la flexibilité ne sont pas toujours synonyme de modernité et de croissance.

Ouvrir tous azimuts les magasins le dimanche n’est pas un moyen de relancer le pouvoir d’achat, même si des ouvertures ciblées en zones touristiques semblent légitimes. Le patron de Carrefour comme celui de Système U, Serge Papin, partagent d’ailleurs cette analyse. Il ne faut pas que cette ouverture vienne déstabiliser la vie de famille et les petits commerces de centre-ville.

Nous serons particulièrement vigilants sur l’avenir des professions réglementées, terme générique qui permet d’englober des professions qui n’ont rien à voir entre elles (pharmaciens, notaires, huissiers, avocats…), sinon qu’elles sont généralement suspectées par la Gauche de mal voter aux élections.

Il ne faudrait pas en effet que sous prétexte de doper la croissance, on en profite pour mettre à bas le modèle économique des entreprises concernées.

 

 

 

 

 

 

Ainsi, si Emmanuel Macron a visiblement renoncé à entrer dans des guerres tarifaires – une décision sage lorsque l’on voit l’inflation des coûts indirects transférés (aide juridictionnelle dont le coût repose en partie sur les avocats ; mise en concurrence de la parapharmacie et contrôle du prix des médicaments pour les pharmacies ; impact pour les études notariales de l’effondrement du secteur immobilier…) – le projet de loi comporte encore certaines zones floues. S’agissant des notaires, un «serpent tarifaire» avec des prix plafonds et planchers serait mis en place. Mais la concurrence ne doit pas être systématiquement tarifaire: elle peut se faire, elle doit se faire sur la qualité. Le problème du serpent n’est pas son ondulation, elle est dans le venin qu’il peut parfois cracher.

L’ouverture du capital est également présentée comme «créatrice de croissance». Mis à part faire tomber dans l’escarcelle de certains groupes étrangers des entités aujourd’hui indépendantes/artisanales, quel est l’intérêt? Qui se cache derrière cette pseudo ouverture, sinon les intermédiaires qui font leur marge sur les coûts de transaction? Il y a aujourd’hui une spécificité des cabinets d’avocats français par rapport aux cabinets anglo-saxons, beaucoup plus puissants. Entre le pot de terre et le pot de fer, on sait d’avance qui y gagnera. L’ouverture du capital, les salariés de l’industrie savent ce que cela signifie: délocaliser les centres de décision. Dans le domaine sensible du droit, cela veut dire également, après avoir anglicisé la justice en l’écartant du modèle de droit romain, faire de même avec les avocats.

M. Macron, mettez aux enchères le tout à Londres ou à Francfort, cela ira plus vite.

La multiplication des offices notariaux ou le libre choix du lieu d’exercice des avocats sont affichés comme des progrès. Il est vrai qu’un certain nombre d’offices notariaux ont disparu. Mais le problème aujourd’hui n’est pas tant le nombre d’offices, d’études ou de pharmacies que le déséquilibre territorial patent dans certaines zones. S’il s’agit de faire dans le domaine des notaires ou des avocats ce que l’on regrette dans le domaine médical, pour aboutir ensuite à des zones rouges de désertification juridique, où est le progrès?

 

 

 

 

 

 

Etrange gouvernement qui prétend limiter la libre installation des médecins et accroître la libre installation des avocats ou des notaires avec des arguments opposés sans que cela n’interpelle personne.

Qu’on puisse appliquer au droit ou à la santé les mêmes principes de libre concurrence que ceux appliqués dans les télécoms ou l’aérien, et ne pas craindre l’apparition d’une justice ou d’une santé low-cost, c’est irresponsable.

Qu’on puisse prôner l’ouverture du capital de professions qui concourent à encadrer des secteurs très stratégiques, sans réfléchir à l’évolution sur dix ou vingt ans dans une économie mondialisée dominée par des entreprises prédatrices, c’est confondant de naïveté.

Qu’on puisse enfin penser que c’est en réformant ce qui fonctionne et en ignorant ce qui ne fonctionne pas qu’on relancera la croissance, c’est décevant.

M. Macron allégez les charges des entreprises! Réformez le RSI et la protection sociale qui asphyxie les entreprises! Vous verrez: l’impact sera bien plus immédiat

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